Le péché pris de haut : faut-il toujours juger ?

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1 décembre 2022

Le péché pris de haut : faut-il toujours juger ?

Dans une société où le regard des autres sur nous et notre regard sur les autres est toujours plus oppressant, nous sommes tous émetteurs et récepteurs de jugement sur tout et pour tout. Mais entre les réseaux sociaux, les médias traditionnels et le monde réel qui sans cesse hurlent leur attachement aux apparences, il est faut sortir de cercle destructeur.
Crédit : TFI

Ce n’est pas l’info la plus croustillante du JT mais je vais vous parler de mon film préféré. Son titre « les enfants du péché » de la réalisatrice Déborah Chow. Pour tout dire ce n’est vraiment un film mais une saga de quatre téléfilms qui nous en disent long sur pourquoi il ne faut pas toujours juger. Attention spoiler ! Le film met en scène une famille riche et parfaite (en apparence seulement) qui est poursuivie de génération en génération par le même péché.

Pour découvrir quel est ce péché pernicieux je vous invite à regarder les films, ou à lire le livre « Fleur Captive », Virginia C. Andrew (1979) dont ils sont tirés, ce serait encore mieux pour vous. S’il ce peut que vous l’ayez déjà regardé ou lu, vous comprendrez peut-être. Mais si vous ne l’avez ni regardé ni lu, ce n’est pas grave du tout, le sujet est ailleurs.

Les enfants du péché : secrets de famille

Crédit : Ciné+

Il s’agit d’un film à la fois dramatique et touchant, choquant et dérangeant. Sans oublier la complexité des personnages et l’invraisemblance de l’histoire qui rajoute ce soupçon de je ne sais quoi qui rend ce genre de film intéressant. Tout du long, on éprouve cette irrépressible envie de juger et critiquer les personnages, leurs actions et leurs choix.

Le film nous transporte dans la vie d’une famille américaine en apparence parfaite, qui pourtant cache un lourd secret. Corinne, l’un des personnages principaux incarné par Heather Graham est la mère d’une belle famille de quatre enfants. Épanouie dans son rôle de femme au foyer bourgeoise, son destin bascule dans l’ombre lorsque son mari décède subitement.

« Tout du long, on éprouve cette irrépressible envie de juger et critiquer les personnages, leurs actions et leurs choix. »

Désormais seule à la tête de sa famille et totalement ruiné, elle se retrouve forcée de retourner dans son passé qu’elle avait pourtant essayé d’enterrer. Unique héritière d’une famille extrêmement fortunée, Corine préférera pourtant tout sacrifier pour vivre librement son amour avec personne d’autre que son oncle, amour qui donnera naissance à leurs quatre enfants.

Seulement voilà pour se refaire une santé financière elle doit retourner vers cette famille qu’elle a fuit et qui l’a renié. Elle sera alors forcée de cacher l’existence de ses enfants et de son ancienne vie à tout le monde, condition posée par sa mère pour la laisser revenir. Enfermé dans le grenier du manoir familiale pour ce qui ne devait être qu’une période éphémère, les enfants finiront par y passer quatre longues années, délaissé par une mère qui prise dans le tourbillon de la fortune dont elle vient d’hériter et l’ivresse d’un nouvel amour, ils poseront peu à peu les bases de leurs propres tourments.

À partir de là, on s’en donne à cœur joie et voilà que de partout fusent les jugements piquant, les critiques de vipères au fort goût de dédain et les indignations. Et ce n’est que chose normal étant donné que l’homme est fait pour émettre des jugements.

Le destin est facteur du destin

Crédit : Télépoche

Nombre de philosophes et logiciens ont travaillé sur le sujet de l’observateur juge à l’instar de Emmanuel Kant dans l’Analyque ou Aristote dans l’Organon. C’est d’ailleurs ce qu’on appelle le jugement copulatif, où nous observateurs décidons de ce qui est bien et de ce mal, de ce qui est juste et de ce qui ne l’ai pas. Sauf que, bien évidemment, ce serait trop simple.

Au fil des scènes on est poussés à se remettre en question, nos précédentes émotions, nos précédentes décisions. Viennent ensuite les explications à toutes nos interrogations. Pourquoi se comportent-ils ainsi ? Sont-ils vraiment responsables de leurs actes et du mal qu’elles causent ? Auraient-ils pu échapper à leur destin ?

« Sont-ils vraiment responsables de leurs actes et du mal qu’elles causent ? »

On comprend que le destin est facteur du destin. Ce film est un bon exemple pour faire le parallèle avec notre propre quotidien. Il nous enseigne à gommer les préjugés, à ralentir avec les aprioris et à se délester des premières impressions pour mieux comprendre le fond des événements et des personnes. Faut-il toujours juger ? Je dirais oui, absolument tant qu’on prend le temps de s’assurer que le juger émis est bien le bon.

Les regards doivent se porter ailleurs

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Crédit : Capture lifetime

En regardant le film, j’aurai pu ne retenir que l’acte incestueux entre une sœur et son frère ou qu’une mère tente de tuer ses enfants en les empoisonnant, mais finalement, prendre le péché de haut c’est choisir d’inclure également les circonstances ayant menées le personnage sur des chemins épineux. Il ne faut pas regarder uniquement l’acte, mais aussi la cause de l’acte. Ça rend les choses bien moins évidentes.

« Il ne faut pas regarder uniquement l’acte, mais aussi la cause de l’acte »

Pourquoi le psychopathe est-il psychopathe ? Pour quelle raison le voleur est il un voleur ? Pourquoi la fille de joie a t’elle décidé de procurer de la joie ? Sigmund Freud nous a appris à regarder au delà des masques, des gestes, des paroles, des actes. Et quand bien même certaines de ces théories ont été discréditées, elles n’en restent pas moins pertinentes dans leurs essences. Les regards doivent se porter ailleurs.

En rédigeant ce texte, j’ai compris deux choses, au paroxysme de la schizophrénie. La première c’est que juger est un exercice très facile à faire. La seconde c’est que juger est exercice très difficile à faire. Émettre un jugement c’est simple, mais ensuite, il faut assumer et porter le poids de ce jugement dans la vie de celui qu’on a jugé. Pas simple. Alors de vous à moi, pourquoi nous infliger ça ? Pourquoi ?

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