Malaise dans la cité : la jeunesse camerounaise est désabusée

Article : Malaise dans la cité : la jeunesse camerounaise est désabusée
Crédit: Wikipedia Commons
9 février 2023

Malaise dans la cité : la jeunesse camerounaise est désabusée

Chômage, coût excessivement élevé de la vie et perspectives d’avenir sans cesse contredites par les méthodes de gouvernances inefficaces et insuffisantes, la jeunesse camerounaise est en perte de repères et vit un profond malaise entre rêves brisés et absence de soutien des pouvoirs publics. Mais au regard de son importance dans les projets d’émergence annoncés, il ne fait aucun doute que dans sa déchéance elle entraînera la nation toute entière.

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Ce 11 février 2023, le Cameroun a célébré comme à l’accoutumée sa flamboyante jeunesse. Le thème retenu cette année est : « jeunesse, réarmement moral, civique et entrepreneurial, gage de discipline pour l’édification d’un Cameroun uni et prospère ». Un thème qui se veut galvaniseur à l’instar des 56 autres qui l’ont précédé, mais tout comme ces malheureux, les résultats escomptés se feront attendre longtemps. Car la jeunesse camerounaise, fer de lance de la nation et espoir pour l’avenir, semble mener sa barque bien loin des attentes annoncées ici et là par le gouvernement. D’elle, on réclame la moralité, la discipline, le travail et l’ambition. Mais si l’homme est le fruit de l’environnement dans lequel il évolue, alors, la jeunesse camerounaise est un fruit que l’on fait pourrir.

Les modèles sont quasiment inexistants et cela à plusieurs les niveaux de la société. Sur Les réseaux sociaux pullulent de nombreuses informations erronées, publiées par des individus qui ont pour objectif unique de gagner un click approbateur ou pas d’ailleurs, c’est le geste et c’est l’attention du public qui compte. Détournés de leur fonction premiere, ils sont malheureusement utilisés à mauvais escient par certains individus qui s’en servent pour partager des contenus destinés à amplifier les luttes ethniques, le sexisme ou encore la désinformation sur des problématiques politiques et économiques importantes et qui mériteraient d’etre mieux comprises des populations. Le problème ne semble pourtant pas prêt d’etre resolu tant les initiatives visant a éduquer les internautes sur le jugement des contenus diffusés sur les reseaux sociaux sont peu nombreuses. Le mal est donc connu et aucune véritable solutions ne semble être véritablement efficace et consciencieusement appliquée pour le soigner. Et pour une jeunesse en manque de repères, difficile de ne pas se laisser embarquer.

Un avenir sans cesse floué

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Après de longues et fastidieuses années d’études récompensées par un diplôme, baccalauréat plus 3, 4 ou 5, il est de plus en plus difficile de prendre chaque jour le chemin du travail avec un taux de chômage à 6,1% en 2021 selon un rapport de la Banque Africaine de Développement. La débrouillardise gagne alors tous les ans des milliers de jeunes raisonnés par le quotidien ardu. Que faire d’autres pour cette jeunesse pourtant si volontaire si ce n’est d’enchaîner les jobs sans lendemain, que d’être abusé par des employeurs aux emplois précaires qui vous prennent, vous utilisent et vous font valser, le remplaçant n’est-il pas au bas de la porte ? Le paradis semble être pour les autres, ceux là qui ne connaissent ni retraites ni chômage et ce depuis des décennies.

Avec un secteur économique privé qui peine à s’épanouir en créant suffisamment d’emploi ou de richesse ainsi qu’une fonction publique surchargée qui attise toutes les convoitises, c’est au plus fort de l’emporter. L’ambition de cette jeunesse camerounaise, affichée ou secrète, est devenue uniforme – à corps défendant, assurément – avoir un matricule de fonctionnaire. Garantie d’un revenu régulier et éternel, certains en arrivent même à le percevoir comme le firmament de la réussite sociale, mais cette ambition épidémique demeure surtout la traduction d’une certaine médiocrité sans cesse poussée dans ses retranchements les plus morbides.

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Le malaise est incessant, le mal est installé en profondeur. Dans les villes, les villages, la jeunesse ne se fait plus d’illusions, la résignation se lit sur les visages et se ressent dans les langages. Une résignation teintée d’amertume et de rancœur tant le mal est installé. A la vérité, la jeunesse camerounaise est en souffrance continue. La violence de la société envers elle, associée au profond mépris de la classe dirigeante, au manque de considération et à l’abandon de ceux qui sont censés la protéger et l’élever, la rendent perdue. De la jeunesse on en attend énormément, mais lorsqu’on vous a tout pris, qu’avez-vous à offrir si ce n’est votre propre vie ? Si tant est qu’elle vous appartient encore.

Les jeunes se noient dans l’alcool et la liberté d’expression qui se perd

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Condamnée semble-t-il à souffrir en silence, la jeunesse veut s’échapper. Les portes de sortie sont semble-t-il nombreuses mais pourtant si dangereuses. Parmi elles, l’alcool tient une place tristement importante. Pour oublier, les jeunes se noient dans l’alcool, la fête et la nuit noire. Le problème est connu et extrêmement grave, mais personne encore une fois ne semble en mesure de donner la solution miracle. La situation est à prendre au serieux, car en plus d’entraîner une forte dépendance et de nuire gravement à la santé, l’alcool cause parfois la ruine financière de ceux qui malheureusement s’y adonnent corps et âme. Mais que faire d’autre que souffrir en silence ? Certains le savent et l’expérimentent parfois à leurs dépend. Le jeu est risqué. Pourtant l’expression de son opinion est un droit fondamental pour chaque citoyen et bien au-delà un devoir. Le sang de la démocratie reste et demeure la liberté de parole.
Mais voilà, il arrive parfois que pour peu que l’on donne son opinion ou que l’on porte un intérêt appuyé sur la gestion des affaires administratives, qu’on finisse six pieds sous terre. La vérité est difficile à faire passer chez certains individus. Martinez Zogo, journaliste violemment liquidé pour avoir exercé son devoir de citoyen l’a appris à ses dépends. Néanmoins, les coupables de cette exécution macabre feront face aux conséquences on espère exemplaires de leurs actes perfides. Malgré tout, l’effroi s’empare de la cité, à tort ou à raison.

Les jeunes, victimes collatérales de la guerre des clans

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Le climat délétère qui depuis quelques années s’installe ne semble pas prêt de laisser place à un soleil rayonnant. On nous parle de guerres des clans, de batailles de succession avec pour principaux protagonistes les plus hautes personnalités du gouvernement, à l’instar du ministre des finances, son homologue du ministère de la justice en passant par le secrétaire général de la présidence de la république pour ne citer qu’eux. Aux milieu de cette ambiance qui rappelle un affrontement céleste de dieux mythologique, les jeunes restés sur la terre, hagards, ne reçoivent que les éclats de lames tranchantes et la pluie d’acide qui terminent de les anéantir. Victimes malheureuses d’une guerre pour la succession hypothétique du président Paul Biya, le feu consumant de bout en bout tous les côtés du navire se fait ressentir dans la vie de tous tout comme l’impression que la nation est en pilotage automatique. Inflation (aux alentours de 6% en 2023), vie chère, rabâchés de partout et sans cesse, ces mots sont actuellement à eux seuls l’expression du malaise dans la cité. N’oublions pas la corruption, le népotisme, l’affairisme, la mauvaise gestion et tant d’autres maux représentant le cancer métastasé qui gangrène la société. Qui pour soigner le mal alors même que le pays dérive sous les yeux de tous du fait du nombre incalculable de problèmes qui ne trouvent aucune solution ? Qu’elle avenir envisager pour notre nation ? Épineuses questions auxquelles l’épais brouillard qui voile les perspectives ne laisse entrevoir aucune réponse. Cependant, tout espoir n’est pas perdu, car la jeunesse camerounaise est forte et travailleuse. Après la pluie, le beau temps, il faut continuer d’y croire et se battre pour un Cameroun meilleur. La tête haute et la dignité plein l’esprit, nous gardons foi en ce que notre pays se relèvera de sa chute et avancera enfin, pour de vrai et pour toujours, vers le développement tout azimut.

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Commentaires

Bidzabi
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l'adage " si jeunesse savait et si vieillesse pouvait" reste d'actualité.

Mandou
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Waouh
Fière de toi je le suis